A chaque nouvelle acTTTus, la parole est donnée à un lauréat des Trophées de la Valorisation de la Recherche 2019. Découvrez la tribune de Chantal Zaouche Gaudron, lauréate du Trophée Coup de cœur.
Chantal Zaouche Gaudron : Professeure de psychologie de l’enfant, UMR Lisst UT2J – Directrice du GIS Bébé, petite Enfance en Contextes
Mes premiers pas dans la valorisation de la recherche
Ma rencontre avec la valorisation de la recherche date de l’année 2008, à Paris, lors d’une conférence du Centre de Liaison sur l’Intervention et la Prévention Psychosociale (CLIPP), organisme de valorisation québécois. Cyrille Munoz, responsable de la Cellule valorisation de la recherche UT2 connaissait mes travaux sur la problématique des violences conjugales et le recensement des instruments de recherche permettant d’apprécier le développement des enfants et des adolescents.
Nous avons essayé, sans succès, de faire aboutir un premier projet en termes de valorisation avec une société spécialisé dans les tests. Le deuxième a connu, lui aussi, de nombreux aléas, la thématique des violences conjugales n’était pas considérée alors comme une priorité de politique publique ou de recherche. Pour autant, nous avions la conviction qu’un tel projet devait aboutir. Le soutien de la Cellule valorisation a permis de finaliser « Sémaphore », avec l’association Animaçao un outil original de sensibilisation aux enfants exposés aux violences conjugales présenté sous forme d’un DVD adjoint à un ouvrage paru en 2016[1].
Le troisième projet 1, 2, 3… Préma ! est né de la motivation, avec plusieurs collègues praticiens et universitaires, après l’excellente thèse réalisée par Flora Koliouli[2], de réaliser un outil (production filmique réalisée par Diode Production et fascicules scientifiques) susceptible d’accompagner parents et professionnels quand un nourrisson nait prématurément. Avec l’aide financière de la Cellule de valorisation de UT2J et le co-financement de la Caisse Nationale des Allocations Familiales, les outils ont pu être finalisés en 2017 et mis en Open Source[3].
Les actions menées aujourd’hui
Le dernier projet, s’intitule SO’IN : SOutien à l’INclusion des enfants présentant des difficultés développementales qui vise à soutenir les familles ayant un enfant présentant des difficultés développementales ou en situation de handicap et à accompagner les professionnel.le.s. La production filmique et le guide d’accompagnement sont en cours de finalisation et seront mis eux-aussi en Open Source en 2020.
Mon retour d’expérience sur la valorisation de la recherche
Ce cheminement me paraît important à expliciter pour rendre compte des premiers écueils et échecs qui ont été les nôtres mais qui ont permis, par la suite, de mieux identifier les partenaires potentiels et la façon dont nous devions présenter nos projets. Ma participation à la 1ère Commission de Valorisation de la recherche mise en place par l’université m’a beaucoup fait évoluer ainsi que les chercheurs de mon université. Les activités que nous y avons menées, les définitions que nous avons trouvées concernant la valorisation dans nos disciplines en SHS et les réflexions collectives ont fortement contribué à m’inscrire, depuis plus de 10 ans, dans cette perspective de valorisation de la recherche. Au début, la valorisation de la recherche était soit confondue avec la diffusion des savoirs, soit considérée comme impossible à réaliser dans nos champs disciplinaires. Je suis convaincue que ce mode opératoire de valorisation de la recherche, s’il ne peut se confondre avec ce que les sciences dites technologiques entreprennent en termes de valorisation avec les impacts économiques qu’elles obtiennent en retour, contribue, dans le champ qui est le nôtre, à :
- faire connaître nos travaux qui sont menés avec la rigueur scientifique requise
- à permettre aux acteurs de la société civile de s’approprier les résultats obtenus.
La définition à laquelle avait abouti la Commission Valorisation est la suivante : « Valoriser, c’est rendre utilisables ou commercialisables les connaissances et les compétences de la recherche ». C’est dans ce cadre que les projets que j’ai pu mener avec de nombreux collègues ont pu se dérouler et aboutir : ils ne sont pas commercialisés mais ils sont utilisables par les acteurs de la société civile et rendent compte des savoirs que nous avons produits. Nos projets ne rapportent pas d’espèces sonnantes et trébuchantes mais contribuent à l’amélioration des pratiques professionnelles et au soutien des citoyen.ne.s (enfants, adolescents, adultes). Il ne s’agit donc pas de valeur au sens économique du terme mais d’une autre forme de valeur : sociétale, culturelle, etc. à laquelle je suis et reste fermement attachée.
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[1] Zaouche Gaudron, C., Flores, J-J., Jaspart, C. Paul, O. & Savard, N. (2016). Exposés aux violences conjugales : les enfants de l’oubli. Toulouse : Eres.
[2] Koliouli, F. (2015, 21 septembre). Approche écosystémique de l’expérience paternelle et du soutien social lors d’une naissance prématurée : Analyse du stress paternel, des stratégies de coping et de la relation avec le nouveau-né auprès de 48 pères (Dir. : C. Zaouche Gaudron et JP Raynaud).
[3] http://beco.univ-tlse2.fr/recherches-en-cours-492071.kjsp?RH=1466780363313&RF=1466780193999)
Zaouche Gaudron, C. & Koliouli, F. (2017). Dépôt de la marque « 1,2,3… Préma ! »